Du Progrès

Du Progrès

Le progrès est un terme dévoyé aujourd’hui. Il recouvre des thèmes et des formes variés :
• le progrès technique, amélioration quantitative ou qualitative de l’outil de production
• le progrès social, amélioration des conditions matérielles d’existence des masses
• le progrès sociétal, « amélioration » de la forme de la société
• le progrès scientifique, développement des connaissances scientifiques
• le sens de l’histoire qui statue une linéarité de l’histoire structurée autour de progrès et de régressions

La liste est bien sûr non exhaustive, il existe de multiples formes de progrès. Mais cela pose la question de la nature du progrès, qu’est-il ? Comment se manifeste-t-il ?

Comme nous avons pu nous en rendre compte, le progrès implique le mouvement, la différence existant entre les deux notions réside dans le fait que là où il y a progrès, il y a une dynamique vers le mieux, que ce soit plus beau, plus juste, plus vrai, alors que le mouvement en tant que tel n’observe pas a priori de direction (la régression étant un mouvement aussi). Le progrès en tant que tel est un concept et non un objet matériel, mais ses conséquences influencent et sont influencées par la matière. Les inspirateurs du progrès sont des objectifs que nous appellerons des idéaux, comme le bien commun, la vérité, le beau, mais son véritable moteur est le mouvement des masses qui le transforme en réalité matérielle. C’est ici que se trouve le lien dialectique entre la matérialité et le concept structurant la notion de progrès.

Certains voient dans le progrès une fin en soi. Selon eux, le devenir est plus important que l’être, ce qui les amène à concevoir une sorte de très contradictoire progrès infini ; puisque l’amélioration est définie par un changement positif entre un instant révolu et l’instant. Le progrès est structurellement fini. Ci-dessus nous avons abordé l’idée de mouvement, ce dernier est défini en physique de façon exogène par le référentiel ; objet considéré comme fixe dans l’espace pour apprécier le mouvement d’un autre. L’idée du progrès pour lui-même insinue un mouvement absolu qui est donc déréférencé, au lieu de se définir par rapport à des idéaux immobiles il ne se définit que par rapport à lui-même. C’est-à-dire que le but du mouvement est le mouvement en tant que tel, ce qui est physiquement impossible. L’idée de progrès absolu nécessite celle de référentiel absolu. L’idéal humain absolu est Dieu, les individus qui défendent l’idée de progrès absolu affirment en quelque sorte qu’ils détiennent cet idéal humain, ce qui est la définition de l’hubris. Donc le progrès dans le cadre humain observe la nécessité de la tradition, de l’immobile pour exister afin de ne pas tomber dans des contradictions surpassant sa propre substance.

Le progrès sociétal tant apprécié par les gauchistes, et les libéraux de gauche n’est qu’une vaste fumisterie. Ici le progrès est défini comme le recul du sentiment personnel d’auto-exclusion à la communauté par l’inclusivité. C’est-à-dire modifier l’apparence de la société pour que tout individu puisse s’y reconnaître sans modifier pour autant les conditions matérielles d’existence ; le mariage pour tous permet d’inclure les homosexuels dans la société et qu’ils ne se sentent pas exclus par leur impossibilité à se marier. Mais des dires des gauchistes cela n’est pas assez, à cause de ce qu’ils appellent l’homophobie « systémique », c’est-à-dire qu’il y aurait une impossibilité à l’inclusion des homosexuels pour des raisons exogènes, dont celle de l’inconscient homophobe des masses. Pour que le progrès sociétal aboutisse, il faut que tous les individus d’une société soient alignés sur une vision inclusive des minorités, et qu’ils rejettent toute vision exclusive jugée discriminante ou indifférente jugée comme de la non-assistance à personne en danger. Ce « progrès » est donc un projet de mettre au pas la majorité par les minorités, ce qui est antidémocratique ; de surcroît notons que les minorités ne peuvent être difficilement réduites à leur rapport à la majorité puisque certaines rentrent logiquement en contradiction comme les féministes radicales et les islamistes rigoristes.

Pour sortir de ces élucubrations autour du progrès revenons à des définitions moins farfelues et hors-sol. Le progrès pour l’homme est une question centrale, certains considèrent que l’amélioration de l’homme vient dans le plaisir, ce sont les hédonistes qui coupent la dynamique individuelle de celle du groupe auquel il appartient. Mais là où l’homme peut par son travail s’améliorer vers un idéal est la conscience de lui-même, d’abord celle de sa force, c’est-à-dire de sa capacité à modifier son environnement, puis de l’évolution de celle-ci dans le temps. Cette conscience de lui-même permet à l’homme de prendre connaissance de ses besoins et de ses capacités, le premier des besoins ressenti par l’homme étant la nourriture. Ensuite, quand l’homme est inséré dans la division du travail il va prendre conscience de ses conditions matérielles d’existence et qu’il peut les partager ou non avec autrui, c’est ici que débute la conscience de classe nécessaire au renversement du capital ; de même que la conscience du partage de traits culturels et la volonté de maintenir cet état de fait est un prérequis pour faire nation. Le progrès de l’homme mène au progrès de la société.

Parfois, morale (chrétienne) et progrès sont mis en opposition, ce qui est une grossière erreur, la morale est le moyen pour l’homme de pouvoir vivre en société, la morale véhicule l’idée de l’homme social parfait vers lequel les individus doivent tendre et non chercher à l’égaler absolument via des règles, préceptes, obligations ou interdictions. Observer la morale comme un cheminement nécessitant le travail de l’homme vers un idéal, nous laisse croire à une dynamique de l’ordre du progrès.

Le progrès est donc une notion bien plus profonde et complexe que ce que laissent croire ses fervents défenseurs, mêlant mobilité et immobilité, matérialité et immatérialité. Menant donc à dire que le progressisme authentique conçoit très bien la tradition, la transcendance et se détache aisément des idioties autour du progrès. Dois-je rappeler l’appel du camarade Thorez aux militants nationalistes ?

Nous te tendons la main, volontaire national, ancien combattant devenu Croix-de-Feu, parce que tu es un fils de notre peuple que tu souffres comme nous du désordre et de la corruption, parce que tu veux comme nous éviter que le pays ne glisse à la ruine et à la catastrophe.
— Maurice Thorez